Les Belges ont-ils encore le seum après la Coupe du Monde ?
24 juillet 2018
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A la base on était juste parti rouler à la Wiko Roller Bike Parade, puis on s’est rapidement rendu compte que tout le monde parlait encore de la Coupe du Monde. Pour certains, l’élimination de la Belgique contre la France n’est toujours pas digérée. Alors que les réactions sur les réseaux moquant le « seum » des Belges ou l’arrogance des Français commencent un peu à faiblir, il était temps d’aller voir nos compatriotes pour prendre la température.
Si vous aimez les sports de glisse et que vous habitez Bruxelles (ou même Wavre, Charleroi, Louvain et Hasselt depuis peu) pas besoin de vous rappeler que tous les vendredis un joyeux cortège de riders déambule dans les rues de la capitale. Au départ de la Place Poelaert, dans le quartier préféré d’Ico.
Des centaines de belges se sont donc rassemblés sur le toit de la ville pour s’adonner à leurs passions respectives. L’occasion de voir des BMXs, skates, rollers ou encore des monowheels, cet objet bizarre et plutôt instable (testé et pas approuvé). L’occasion surtout (!) de parler de belgitude, de foot et de Coupe du Monde.
Alors que les DJ mettent l’ambiance près de la ligne de départ, on est parti à la rencontre des participants.
Michael : 33 ans, bon vivant et fou des diables et Alex : 32 ans, youtubeur débutant possédant une barbe parfaite.
Déjà, concernant le sentiment d’après Coupe du Monde, tout le monde est sur la même longueur d’onde. Encore un léger goût amer pour la demi-finale, mais extrêmement fiers de leur équipe. Selon Michael, c’est une bonne chose d’avoir une équipe comme la nôtre, « car elle permet de renouer les liens entre Belges« .
Son pote « Alex La Barbe » le coupe directement. Selon le jeune trentenaire, c’est de la poudre aux yeux.
« Il y a que pendant la période de foot qu’on dit qu’on est Belge. Dès la fin de la coupe du monde, t’es de nouveau un black, de nouveau un arabe, blanco tout ce que tu veux ! »
Bref, les deux potes se sont lancés dans un débat identitaire, on s’est éclipsé discrètement.
Seum attitude
Je ne vous apprends rien, la rivalité Franco-Belge existe depuis la nuit des temps, plus encore chez les adeptes du ballon rond. Après la demi-finale, les réseaux sociaux ont été inondés de critiques en tout genre, d’abord de la part des Belges et peu de temps après, par nos chères voisins français.
Putain j’ai perdu mon portefeuille j’ai trop le 🇧🇪
— Adm (@Sevindik2017) July 17, 2018
Alors que les commentaires haineux des belges étaient de plus en plus fréquents, les Français ont préféré jouer la carte du chambrage pure et simple.
Lucas Hernandez, jeune joueur de l’équipe de France, a même chambré les Diables Rouges lors de la célébration de leur titre de champion du monde, à l’Élysée.
Lorsque j’ai voulu savoir pourquoi les Belges avaient autant le seum sur leurs voisins Français, j’ai eu deux types de réponses. A vous de mesurer le degré de « seum » ou non.
Anas : 21 ans, accro au bike et Pawel : 20 ans, belgo-polonais, fan du PSG
« L’équipe de France n’a pas joué Fair-Play «
Ça, c’est la réponse de Pawel, qui a mis de côté la querelle belgo-française pour se concentrer sur « l’analyse » footballistique.
« Ils n’ont pas joué honnêtement. On aurait pu voir un beau match, même une belle défaite mais ils ont pas été fair-play ». Preuve à l’appui selon lui, « sur les 26 dernières minutes du temps réglementaire, le match a été interrompu pendant plus de … 14 minutes« !
« Les deux équipes ont bien joué »
Anas est plus positif. Pour lui, pas le temps pour les regrets, c’est plutôt l’heure de la réconciliation.
« Les deux équipes ont bien joués, on a bien ressenti la tension à la fin du match. Par contre, je vois pas l’intérêt de se disputer avec un pays qui, en plus, est notre voisin. Ça fait plus de deux semaines maintenant… ».
« Les Français sont des grandes g***** »
Je n’ai pas encore terminé ma question que Michael me coupe net. « On a voulu se venger car ils ont toujours eu des grandes gueules face à nous. Ils nous ont toujours considérés comme un bas peuple ».
Malgré le fait que son pote Alex ne soit pas un grand fan de football, il est pourtant d’accord avec lui. Selon lui, c’est un mépris qui dépasse le sport.
« La France est un peuple avec une plus grande histoire que la Belgique, je suis d’accord. La France a une notoriété plus grande que la Belgique, je suis d’accord. Ce n’est pas pour autant qu’ils sont meilleurs que le monde entier ! Pour moi, la France c’est comme les États-Unis. Un américain se croit toujours supérieur que le restant du monde, un Français pareil ! »
Adopte un Belge
Mais c’est quoi un « Belge » en fait ? Quelques minutes avant le grand départ, les participants tentent de donner leur définition du Belge typique. Un sujet tellement complexe et bordélique, qu’on a dû simplifier la question.
On a donc demandé à nos riders de définir le Belge en 3 mots.
Nacer, 16 ans, expert en roller et fan de 4keusGANG
« Cosmopolite »
C’est Nacer, le plus jeune des interviewés, qui mentionne ce terme avant les autres. Selon lui, le Belge est particulier car il est, je cite, « un mélange de cultures ».
« Ce qui me plaît, c’est qu’on continue à accueillir des étrangers, certainement pas comme tout le monde le voudrait, mais plus que dans d’autres pays. Donc le Belge est unique parce qu’il est un mélange de plein de cultures ».
« Bon vivant »
C’est le terme adéquat pour définir tous les mots que j’ai entendu au sujet du Belge. A savoir, « Bière », « Alcoolique », « Fêtard », « Blagueur », bon c’est cool tout ça, mais ça va pas nous aider…
Michael nous explique que le Belge sait se lâcher, sans avoir peur du regard des autres.
« On se prend pas la tête, on s’en fou d’être ridicule. C’est ça qui fait notre force. SI il y a bien quelque chose qu’on sait faire chez nous, c’est la fête fils ! »
Anas, en fin d’interview, insiste bien sur le mot alcoolique (bah voyons).
« C’est juste la base, c’est pour ça que je l’ai pas dit au début, ça coule de source. Le Belge, c’est la petite frite et les petites bières, c’est cliché mais vrai, tu vois ce que je veux dire ? »
« HUMBLE » (sit down)
Voilà le dernier mot que les participants ont choisis. Le seul qui fait l’unanimité. Nacer pense que le Belge respecte les autres.
« Je trouve qu’on est humble. En Belgique, on sait charier et se faire charier mais on a nos limites. On va pas s’acharner gratuitement ».
Michael, lui, a un discours à double sens.
« On est fiers d’être Belge ! Moi quand je pars en vacances, je dis directement que je suis Belge. Mais c’est pas pour autant qu’on pète plus haut que notre c** ! On est patriote mais on est humble ».
Bref, même pour les Belges qui ont encore le seum, le remède se trouverait donc dans leur propre nature. Vivement l’Euro 2020.
Lino Marchesi
(Crédits photo d’illustration: EG)