Fortnite et XXXTentacion: dans la tête de Lord Gasmique
6 août 2018
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Il est sans doute l’une des plus grosses sensations trap en Belgique. A seulement 19 ans, Lord Gasmique a envie de bouffer le micro entre deux sessions de Playstation. On a été le voir au Ride x Rap Festival, il a tout donné.
En ce début d’été, le parc de la Woluwe (Bruxelles) vibre sous les gros beats de trap et la chaleur. On était au Ride x Rap Festival, le nouveau rendez-vous skate et musique, sous une chaleur diabolique.
Diaboliques comme les cris qui retentissent du côté de la main stage. C’est Lord Gasmique, jeune démon bruxellois, en train de secouer son public avec un pogo venu des enfers.
Il a fallu qu’on laisse le jeune talent reprendre ses esprits. Après une micro sieste, il a pris le temps de discuter avec nous.
“Je suis trop content du concert, mais je suis mort mec ! Je suis pas très sportif de base. Du coup, faire des pogos avec 30 degrés, c’est juste mortel !”
Il prend d’ailleurs comme exemple son pote Roméo Elvis qui, dans ce genre de moment, arrive à gérer son public à un niveau ultime. Roméo et Lord se connaissent depuis plusieurs années, quand le petit gars du 1630 était encore caissier.
“A l’époque, je le croisais souvent car on habitait dans le même quartier à Hero (Uccle). Il bossait encore au Carrefour à ce moment là. Je kiffais déjà de ouf ce qu’il faisait, et je lui envoyais de temps en temps un petit freestyle. Un jour, il a partagé un de mes freestyle, ça m’a fait kiffer !”
Faut dire que chez nous, c’est devenu monnaie courante de se faire des passes entre artistes. Selon le jeune rappeur, c’est une pratique bien propre au rap belge, et surtout grâce aux “tontons”.
Mercé les tontons
Tonton est un mot à ne pas prendre à la légère pour Lord Gasmique. Un mot qui a beaucoup de sens pour lui, car il joue un rôle primordial dans la carrière de chaque artiste.
« Le tonton, c’est le gars plus âgé qui a l’expérience. Il est peut-être pas tout le temps là mais il te connaît et partage son expérience avec toi. Si tu fais une connerie, on t’envoie chez le tonton !”
Et quoi de mieux pour un jeune rappeur d’avoir comme tonton non seulement Roméo Elvis mais aussi le duo Caballero & JeanJass ! C’est d’ailleurs JeanJass qui a créé la prod du son “Concret”, l’un des morceaux phares de Lord.
“Je vois le rap comme un sport mais aussi comme un exutoire” Alors qu’on cherchait les raisons pour lesquelles le Lord avait choisi de faire du rap, sa réponse est tombée plus que naturellement.
“Je suis un amoureux de la langue française. Et avec le rap, tu peux tout faire. C’est comme si le rap c’était le sport et que chacun pouvait trouver sa discipline, améliorer ses skills. En bossant, tu peux devenir le meilleur de ta catégorie”.
Ensuite, il y a l’aspect “exutoire” dans le rap qui a permis à Lord Gasmique de cracher les démons qui l’habitait. Dans son titre Sans limites, issu de l’album “Tueurs”, il donne une vision assez pessimiste de la vie.
“On a tous vécu des choses difficiles dans la vie mec, chacun à son échelle. Mais j’ai été affectés dans certains moments de ma vie, et ça se ressent dans mes textes. Dans Sans Limites, je vois la vie en mode caca, car pour moi c’est une fatalité, comme pour X”.
RIP X
Lord fait évidemment référence à XXXTentacion, jeune rappeur américain de 20 ans, assassiné froidement dans sa voiture il y a quelques semaines. Un drame qui a solidement marqué le jeune bruxellois.
“Ça représente bien la fatalité de la vie. Tu peux rentrer à la maison demain et te faire poignarder par un bouffon, que tu le mérites ou non. En plus, X avait un vrai message derrière sa musique, malgré toutes les crasses qu’il a pu faire, ou on a pu entendre sur lui.”
XXXTentacion avait secoué et marqué les plus grands noms du rap (Kanye West, Jay Z ou encore les Migos) en quelques années, grâce à sa créativité. Pour Lord, il était l’exemple type de l’artiste complet.
“X est un artiste qui faisait de tout, sans jamais être catégorisé. Le malheur, c’est que les gens ont déjà mis une image de mec sombre sur moi. Alors que pour moi, l’artiste parfait, c’est celui qui essaye d’aller sur tous les terrains.”.
C’est la raison pour laquelle tu peux entendre le Lord rapper sur des thèmes divers sans sens précis. On est d’ailleurs tombé sur un freestyle où il rend hommage au jeux vidéo Fortnite, la battle royal la plus célèbre de tous les temps.
“Je suis fou de ce jeux ! Je suis pas une star mais je commence à avoir un beau niveau. C’est trop addictif ce truc, je peux passer des heures devant Fortnite”.
Le jeune rappeur en profite pour chambrer l’un de ses potes qui, apparemment, n’arrive pas à passer au dessus de lui.
L’inspi est 100% francophone
Alors que le soleil commence à tomber sur Bruxelles, Lord veut conclure en citant ses inspiration musicales. Et, à part X, ses coups de cœurs sont certifiés 100 % rap francophone.
“Lomepal, c’est l’artiste que je suis depuis j’ai commencé à rapper. Cherche pas, il m’a matrixé trop fort celui-là ! Sa technique, sa musicalité, je sais même pas comment l’expliquer, c’est complètement fou !”
La deuxième personne à l’avoir matrixé, c’est Isha, Bruxellois comme Lord.
“Je suis absolument fanatique d’ISHA. C’est un poète. Dans chacun de ses sons, il raconte des histoires et il le fait d’une belle manière. Une phrase simple mais qui m’a bouleversé de lui, c’est “je chante la poésie des grands boulevards”. Il décrit fort le simple fait de rapper la rue, et je kiffe ça”.
Avant d’arriver au niveau de ses idoles, Lord a encore (forcément) un peu de boulot. Et ça tombe bien, à l’instar d’un Ico, il prend le temps de travailler patiemment sur son premier projet.
Une lucidité et une maturité propres aux artistes de chez nous. Cocorico.
Lino Marchesi
(Crédits photos: Relaxseph)